L'émergence des sociétés de photographies
La pratique de la photographie amateur apparaît très tôt. Toutefois elle reste réduite à une classe bourgeoise aisée. Qui a, en effet, les moyens de s’acheter le matériel nécessaire aux prises de vue et surtout la place d’installer un véritable studio ? Il faut attendre les années 1880-1890 pour voir une augmentation significative de la pratique amateur, liée à une évolution déterminante de la photographie.
L’arrivée des émulsions au gélatino-bromure d’argent, plus commodes et plus rapides, constituera dans les années 1880 un véritable tournant, dans la pratique, mais surtout dans la fabrication qui passera à un stade industriel, en témoigne l’essor des Industries Lumière, spécialiste de la plaque sèche. Simultanément, les appareils se réduisent en taille et en poids ; les studios de photographie élargissement leur activité à la vente de ce matériel. C’est une évolution complète du processus photographique, de la prise de vue jusqu’au développement. Ces facteurs permettent d'envisager la photographie quelque peu libérée des contraintes du studio, elle devient plus attirante et s'attache à aborder de nouveaux terrains : paysages, monuments...
L’amateur de cette fin du XIXe siècle n’est pas encore le « photographe du dimanche » qui s’attache à fixer les petits et grands moments de la vie familiale. L’amateur a du temps, des moyens ; il est issu de cette bourgeoisie libérale, et surtout il a un esprit instruit et curieux des changements de l’activité photographique ; c’est souvent un technicien compétent et exigeant. L’avènement dès le début du siècle de la photographie en couleur, l’autochrome, entretient sa passion qu’il pratique bien souvent au sein d’un club.
A partir de 1880, on assiste en France à la multiplication des sociétés de photographies. Au nombre de 37 en 1892, elles dépassent largement la centaine vers 1905.
En dehors de ces cercles associatifs, des photographes sans connaissances techniques, dont l’intérêt s’exerce au sein du cercle familial ou occasionnellement, se multiplient. Cette pratique corrélée à l'essor du tourisme prend vraiment son envol avec la révolution apportée par Kodak et sa devise explicite « pressez sur le bouton, nous faisons le reste ». Elle permet une production photographique de masse à un faible coût et touche alors un plus large échantillon social. Des commerces spécialisés uniquement dans la vente d’appareils photographiques apparaissent à Roanne au début du siècle et se développent dans les années 30 notamment dans les « grands magasins » comme les Dames de France.
La photographie se répand largement, devient à la portée de tous et commence à s’imposer comme l’indispensable témoin des petits et grands moments de la vie familiale.

