Souris des villes, souris des champs

Depuis quand les femmes travaillent-elles ? Si elle peut paraître choquante, cette question est pourtant régulièrement posée. Alors qu’elle ne l’est pas dès lors qu’il s’agit des hommes. En effet l’inconscient collectif a intégré que, depuis la nuit des temps, le développement économique des sociétés est le fait de ces derniers. Et que la sphère domestique demeure le royaume des femmes. Et pourtant, c’est oublier que celles-ci ont toujours travaillé et que, fut un temps, aucune activité ne leur était interdite. La femme pouvait être paysanne, commerçante, médecin ou ouvrière. Du moins jusqu’au XVIe siècle. Car c’est à cette époque que le travail des femmes commence à être remis en question et que son histoire cesse d’être linéaire. La participation des femmes à l’économie ne cessant, par la suite, d’alterner périodes favorables, durant lesquelles le statut et les droits des femmes progressent, et périodes de régression.

Cela est particulièrement vrai en temps de guerre. S’il est fait appel massif aux femmes pour maintenir l’activité du pays, dès lors que le conflit cesse les travailleuses sont bien vite renvoyées dans leur foyer avec, pour objectif principal, le repeuplement de la Nation.

Dans le monde tu travail comme dans celui domestique, la femme ne peut disposer de son corps comme elle l’entend. Subordonnée au regard masculin, elle se doit de préserver la morale, tout en demeurant féminine. Le corps des femmes gêne et embarrasse. Il se doit de disparaître sous des tenues qui le gomme voire le déforme. Petit à petit, on lui impose le port d’uniformes. Si ceux-ci garantissent la bienséance, ils présentent l’avantage de rendre la femme invisible, notamment auprès de patrons exerçant en toute impunité un droit de cuissage qu’ils pensent acquis.

Femme donnant à manger aux canards

En 1965, les femmes mariées sont enfin considérées comme des travailleuses à part entière Elle obtient le statut d’exploitante agricole. Et pourtant, le travail rural des femmes est aussi vieux que l’apparition de l’agriculture. Ce qui n’a pas empêché son invisibilisation. Si les hommes labouraient, fauchaient, les femmes faisaient tout le reste, en plus d’entretenir le ménage.

Peu représentée dans l’art, la paysannerie bénéficie d’un regain d’intérêt au XIXe siècle Pourtant il faut attendre Millet pour voir apparaître une représentation réaliste de la vie aux champs. Auparavant, le mythe bourgeois pudibond de la vie rurale idyllique prévalait, telle cette gravure montrant une paysanne rêveuse. Les « glaneuses » choquèrent en leur temps par leur pose et leur tenue. Penchées en avant,  vêtues de haillons, elles semblaient n’avoir cure de la morale et de la bienséance.

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Une sortie d'usine à Roanne

Au XIXe siècle alors que la main d’œuvre féminine devient indispensable, l'usine n'est pas le lieu des femmes. Rien n'est conçu pour faciliter leur présence. Au contraire, tout concourt à leur ôter les moyens de protection, dans une logique de dénégation et de mise à nu. Elles n'ont le plus souvent pas de vestiaires propres, elles se déshabillent dans l'encoignure d'un pilier, dans des endroits où tout le monde passe. 

On est loin du stéréotype de cette carte postale, véhiculé par les ouvrières elles-mêmes. En effet, dès qu’elles sont en représentation, elles adoptent une tenue bourgeoise leur conférant une certaine dignité.

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Salle des femmes de l'hôpital de Roanne

L’origine de la profession d’infirmière, tout comme celle d’institutrice, est apparentée aux ordres religieux. Après les grandes épidémies, la fonction soignante est repérée et organisée dans la société avec l’apparition du mot « enfermier » en 1398. Cependant, on se rend compte que l’acte de charité ne suffit plus, le soin requiert des compétences et des formes d’organisations. En Occident c’est l’influence de Florence Nightingale, convaincue que pour savoir soigner il faut avoir appris, qui est à l’origine de la création des premières écoles d’infirmières.

Lorsque le soin était prérogative des religieuses, les vêtements portés par ces soeurs infirmières étaient ceux de leur Ordre. En devenant institution publique et laïque, l’Hôpital imposa de nouveaux codes. Hors de question que les infirmières exercent dans des tenues civiles. Elles devaient à la fois incarner dignité et moralité. C’est pourquoi un uniforme leur fut imposé. Proche de la tenue des sœurs, il se distingua par l’adoption de la couleur noire, symbole de l'autorité et de la respectabilité.

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Ecole ménagère du Pensionnat de l'Immaculée Conception de Roanne

Avant 1870, les jeunes filles n'ont pas forcémznt accès à l´enseignement scolaire. Elles sont éduquées a minima afin de devenir de bonnes épouses et mères de famille. Avec la naissance de la IIIeme République, les temps changent. Si les femmes sont toujours considérées comme inférieures, elles obtiennent le droit à la scolarité. Mais les programmes sont différents. L’éducation morale et religieuse tient une grande place ainsi que les travaux d’aiguille et la puériculture.

Dans un premier temps, les congrégations religieuses prennent en charge cet enseignement. A partir de 1881, celui-ci se laïcise avec la création de l’École normale supérieure d'enseignement secondaire de jeunes filles de Sèvres. Désormais, les femmes peuvent devenir enseignantes. Aucun uniforme ne leur est imposé mais elles doivent donner l’exemple et faire montre d’une parfaite moralité. Les rapports d’inspection de la fin du XIXe siècle s’intéressent d’ailleurs surtout aux mœurs, à la tenue et à la morale des enseignantes.

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