La femme en son ménage

En Occident, le couple est traditionnement étudié à travers le prisme de l'amour, du mariage et de l'égalité. Or, cette vision est une invention relativement récente que l'on peut approximativement dater des années 70. Historiquement, le couple pouvait prendre plusieurs formes et la femme n'y avait pas toujours droit de cité.

Dans l’Antiquité, la place de l'Amour au sein du couple ne se posait même pas. Grecs et Romains distinguaient l’amour sexuel de l’amitié. Ils n’imaginaient pas que les deux puissent être réunis dans la relation d’un homme avec une femme, à plus forte raison d’un mari avec son épouse". La sexualité était souvent vécue en dehors du couple ou ne se pratiquait avec l'épouse qu'afin d'avoir des enfants légitimes. Dès le IIe siècle, une morale sexuelle stricte s’affirma : la procréation seule définissait une conception du mariage.

En 1181, le mariage devient un sacrement. Désormais, pour tous les chrétiens de l’Occident, une même union matrimoniale s’imposa. Même s’il existait, parmi les laïcs, des célibataires et des concubins, la vie de couple entre un homme et une femme devint le modèle à suivre. L’alliance matrimoniale reposait alors sur une relation asymétrique, car l’homme était considéré comme juridiquement responsable du foyer, devant protéger l’ensemble des membres de sa maisonnée.

Le mariage était alors lié autant aux intérêts politiques, sociaux, religieux et familiaux qu’à une rencontre au cours de laquelle l’homme décidait avec les siens de la femme à épouser. Il n’y était pas nécessairement question d’amour. Cette vision du mariage prévalut durant tout l'Ancien Régime mais également au-delà. Les bouleversements hérités de la Révolution française ne ruisselèrent pas jusque dans la sphère familiale où la femme continua à être considérée comme  inférieure à son mari

Il fallut attendre la naissance de la femme active, indépendante financièrement, pour que disparaisse le personnage du mari-protecteur, garant d'une sécurité matérielle.

Couple de femmes grecques

"Les courtisanes, nous les avons pour le plaisir ; les concubines, pour les soins de tous les jours ; les épouses, pour avoir une descendance légitime et une gardienne fidèle du foyer". Cette célèbre phrase prononcée par le plaidant du discours Contre Nééra, attribué à un certain Apollodore d’Athènes, résume la façon dont l'antique civilisation grecque considérait les femmes. Éternelles mineures, elles ne possédaient aucun droit juridique ou politique. Toute leur vie, elles devaient rester sous l'autorité d'un κύριος / kúrios (« tuteur ») : d'abord leur père, puis leur époux, voire leur fils

Dans le foyer familial, on s'attendait à ce que les femmes soient en mesure d'assurer l'éducation des enfants et de gérer les besoins quotidiens du ménage. Les contacts avec des hommes en dehors du cercle familial étaient découragés et les femmes occupaient en grande partie leur temps à des activités d'intérieur.

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Fils Royal Ra-Hotep & Dame Nefer-Ta

Les statues de couples égyptiens constituent un modèle unique de représentation où homme et femme sont  traités à égalité stricte, tant du point de vue des dimensions que des postures. Seule différence la carnation de la peau, plus foncée chez l'homme, puisque l'on considère qu'il est plus amené à travailler dehors.  Elles reflètent la réalité de cette civilisation où la femme n'était pas une "mineure" mais jouait bien à armes égales, dans bien des domaines, avec les hommes. Les Égyptiennes possédaient des biens, géraient leur patrimoine, pouvaient exercer la médecine ou d'autres professions. Dans le domaine conjugal, en se mariant elles conservaient leur nom, pouvaient divorcer, intenter un procès pour récupérer tous les biens du ménage et gagner ce procès, puis se remarier.

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Les Dethève dans leur salon

Le Code civil de 1804 fait des femmes des mineures, soumises à l’autorité d’un homme, père ou mari. Au XIXe siècle, la femme est donc avant tout une mère et une épouse. Cependant, une nuance existe selon qu'elle appartient à la bourgeoisie ou aux classes populaires. Parmi celles-ci, la majorité des femmes exerce une activité. Que ce soit dans le domaine agricole, comme domestique ou au sein de leur maison. Ce même si elle est doit, en sus de son travail quotidien, assurer la tenue de la maisonnée.

À l'opposé de cette vie rude, l'épouse appartenant aux classes aisées est entièrement accaparée par maison. Elle doit obtenir le résultat escompté sans que soient visibles le travail et les efforts qu’il nécessite. Tous les manuels de savoir-vivre destinés à la bourgeoisie égrènent les multiples occupations d’une bourgeoise qui ne doit jamais être oisive. Du regard, la bourgeoise doit tout contrôler, du lever matinal au coucher. Parallèlement aux devoirs du foyer coexistent ceux de représentation. La femme doit ainsi se montrer charitable, mondaine, soutien sans faille de son laborieux époux tout en respectant les codes de la bienséance.

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Un pasteur indigène et sa femme

En 1896, Madagascar devient colonie française. En plus des lois en vigueur en France, sont  également introduits de nouveaux modèles sociétaux. Ce remodelage de la société malgache participe du processus d'acculturation. Celui-ci se manifeste à  de nombreux niveaux, jusque dans l'aspect physique des habitants de l'île. Ceux-ci doivent peu à peu abandonner leurs habitudes et se vêtir à l'européenne. Une façon pour les colonisateurs de s'assurer de la bonne moralité des peuples civilisés. Immortalisé sur ce cliché de propagande, un couple devient le parangon de la colonisation fantasmée. Fidèle copie du couple occidental, la femme y est montrée pudiquement vêtue au bras d'un mari ayant adopté tous les codes du gentleman européen. Ce type de représentation poursuit un double but. Véritable image publicitaire, elle sert le propos colonialiste en témoignant de sa réussite. Mais elle devient également "miroir" pour les peuples colonisés. A se regarder vêtus de la sorte, ils vont s'habituer. Et intégrer petit à petit les codes vestimentaires, puis moraux, des occidentaux.

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